ROYAUMINE
ou
l'herbe je-veux
Extrait Numéro 3
Youhhhouuu, Bonjour toi qui me lis !
Comment était ta semaine?
Moi, j’ai vécu plein d’histoires et d’aventures en cherchant mon herbe! Et toi, tu as cherché quoi cette semaine?
Tu sais qu'on m'a interdit de tout te raconter, puisqu’il te faudra attendre le livre en papier issu du bois. Que c'est dur d'obéir!!
Tu as bien compris que le but ultime de ma vie est de trouver l’herbe je-veux. Et j’exploite tous ceux qui sont autour
de moi pour y parvenir. Y compris Jésus et mon frère cadet…
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Allez je file, Henri le jardinier m’attend !
Royaumine, princesse sur terre
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(…)
Ce matin, le curé du village dispense le catéchisme aux enfants. Ils ne l’estiment guère, ce personnage grotesque et boiteux. Ils guettent son arrivée, agglutinés aux carreaux tels des moucherons écrasés sous les sabots des chevaux de trait.
Monsieur le curé boite de toute sa jambe, sa serviette sous le bras, une pastille à la bouche qui dégouline sur ses lèvres et forme une mousse blanche dégoûtante sur son menton. Comme chaque semaine, il amorce la leçon par l’unique question, las de la poser sur le fil de l’absurdité. Les enfants retiennent leur inspiration, et au moment où il la prononce, en séparant chaque syllabe, KI EST DI-EU, ils expirent en force les répliques qui les rendent moins bêtes aux yeux de Dieu, plus idiots aux yeux des hommes. Ils les psalmodient en chœur, elles dont l’expression profonde atteste de manière inéluctable de la foi en le divin : « Le fils de l’homme ? Dieu fait homme ? Celui qui est dans la trinité ? Le fils vivant ressuscité ? » Les bambins persiflent avec fierté les ripostes, apprises par cœur depuis la nuit des temps et transmises de génération en génération. Ce rituel hebdomadaire prend fin le jour de la première communion. Un événement au village.
Le château respire la frénésie des préparatifs. Royaumine, seule dans sa chambre, s’agenouille devant sa statue en bois et prie :
« Aujourd’hui, moi, Royaumine, j’entrerai dans le royaume des cieux, pieusement, les mains tournées vers le soleil levant, vers la lune endormie, vers les étoiles cristallines, avec une dévotion éternelle, avec l’humilité des saints. Moi, accédant au cercle des élus, des mystiques, ceux qui touchent à Dieu l’instant infime d’une vie, ceux dont le privilège suprême consiste à porter une robe blanche, écrin de la pureté. Nul ne soupçonne l’insoutenable frisson qui parcourt mon être en ce jour empreint du divin, nul n’imagine la puissance des vibrations qui secouent ma cage thoracique, nul ne conçoit la force du flux sanguin qui coule dans mon corps. Je m’élèverai sur l’autel de l’Immaculée Conception, instant de grâce que le seigneur m’accordera, à moi, princesse de la colline. Parce qu’aujourd’hui, lorsque j’avalerai le saint sacrement pour la première fois de mon histoire sur terre, dissimulée sous le voile angélique des vierges bigotes, j’ordonnerai à l’enfant Jésus de me révéler la cachette de l’herbe je-veux. »
Alors que le curé s’éloigne des communiants après avoir déposé sur leur langue l’agneau de Dieu - celui qui enlève les péchés du monde- et que Royaumine retient son souffle au moment de formuler sa requête à voix basse, Mabelle se met à hurler de toutes ses tripes. Mabelle n’a pas reçu son hostie, Mabelle n’a pas été sanctifiée. Ses cris stridents réveillent l’assemblée anesthésiée par l’homélie insipide du grand boiteux et le plan de la princesse est détourné par ce tragique incident.
La messe terminée, tous sortent de l’église. S’isoler dans ce lieu sacré pour réitérer la supplique relève de l’utopie. Trop d’effervescence.
Les hôtes se regroupent, laids et voraces, attendant tels les fauves en cage l’agape des festivités. Royaumine regarde son frère Dorado. Est-il celui dont le génie fabriquerait l’herbe je-veux ? Si elle lui dévoilait son secret, la trahirait-il ? En chemin vers le banquet, elle filtre toute molécule prédisposée à injecter dans son cerveau un stratagème qui ne menace pas la détention exclusive de la plante.
À brûle-pourpoint, elle se convainc que la chambrette de son frère cadet lui confèrera des pouvoirs créateurs !
Obnubilée par cette idée, elle en perd l’appétit, et pendant que les convives s’amusent, elle scrute Dorado avec attention. Il dégage une présence surnaturelle. Évanoui dans ses rêveries, il repose sur un nuage cotonneux issu d’une autre galaxie. A-t-il été ensemencé sur une planète inexplorée ?
Les uns bavardent, trinquent et mangent. Les autres chahutent, cavalent et dévorent. Tous, sauf Dorado. Son intelligence sans égal interpelle sa soeur. Les yeux, sur lesquels glisse une mèche bouclée brune, diffusent une lueur ardente, reflet du mystère de sa naissance. Son regard, celui des sages, dépouille tout homme de sa coquille creuse, et la remplace par le philtre de l’enjouement. Dorado réverbère l’âme d’un cosmos lointain, porte dans ses mains la lumière du monde. À chaque clignement de sourcils, il accorde à l’univers une invention. Candeur et sensibilité émanent de son corps frêle et l’instinct de sa sœur aînée l’enveloppe de son aura protectrice. Pérégrinations à travers leurs vies fabuleuses, qui entraînent Royaumine vers la décision de s’approprier de la chambre du cadet. (…)
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